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Le Dernier des Mohicans (Michael Mann -1992)

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Fenimore Cooper avait écrit cette histoire en 1826, Michael Mann la ressortait des tiroirs en 1992, osant ce que d'autres avaient maintes et maintes fois essayé : rendre compte au cinéma d'un rare et puissant souffle romanesque.


Pitch                                                     

En 1757 dans l'Etat de New York, alors que la guerre fait rage entre Français et Anglais pour l'appropriation des territoires indiens, un jeune officier anglais, Duncan Heyward, est chargé de conduire deux sœurs Cora et Alice Munro jusqu'à leur père. Ils sont sauvés d'une embuscade par Hawkeye, un frontalier d'origine européenne, élevé par le Mohican Chingachgook et son fils Uncas. Les trois hommes acceptent d'escorter les deux jeunes filles jusqu'à leur destination.


Daniel Day-Lewis. Collection Christophe L.Le Dernier des Mohicans est surpuissant en émotions, car il plonge le spectateur dans un « ailleurs » dans lequel seul l'amour reste la branche sur laquelle s'accrocher. Monde de brutalité, d'impérialisme, le Nouveau Monde que se partagent les « conquistadors » modernes, Français et Anglais, semble ne pouvoir pencher pour l'un ou l'autre qu'avec les Indiens. Mais aussi fatalement à leur détriment. Esseulant le spectateur parmi un monde de conquérants bestiaux et avides, et des autochtones Indiens qui nous semblent étrangers, Le Dernier des Mohicans parvient à transporter et enivrer de joies primaires et de sentiments premiers. Tel un retour à ce qui nous fait respirer, ce long-métrage abat toutes nos habitudes superficielles de vie, pour nous importer dans un univers formidablement autonome, dans lequel on cherche des points d'attache...qui se dérobent : entre la guerre, la mort et le peu de valeur donné à l'homme, choisissez votre camp !

La raison de la guerre semble de loin la plus forte, elle est même parvenue à faire du chef de la tribu Huron l'Antéchrist de l'homme blanc, tellement il a vu la mort de près par leur faute. Les militaires blancs ont leur conception du monde, qu'ils se doivent d'imposer en écrasant un autre blanc, tout en se jouant des autochtones qu'ils méprisent profondément. Au milieu de ces bêtes humaines va se dresser dans un retentissant coup de foudre, l'amour d'un homme et d'une femme dont rien n'aurait jamais pu permettre une telle union. Et pourtant si. Alors il faut y croire, c'est la seule réalité que nous acceptons dans ce monde déplorable-la.

Daniel Day-Lewis. Collection Christophe L.Michael Mann, superbement secondé par un Daniel Day-Lewis endurci par l'Indien et une Madeleine Stowe qui constate la violence de ses pairs britanniques, réussit alors le tour de force de coller à la petite histoire dans la Grande, celle de Cooper, en rétrécissant progressivement le champ depuis le désastre humain de la guerre entre Français et Anglais jusqu'à la résistance ultime de deux êtres unis par l'amour. Alors on tente d'y croire, de croire en eux, en leur magnifique force qui pourtant paraît bien maigre face à l'effroi local, mais on se doit d'y croire...parce qu'au-delà : il n'y a rien.

Daniel Day-Lewis. Collection Christophe L.C'est l'épopée du dernier du peuple Mohican, qui se noie dans l'amour d'un fils adoptif qu'il chérie autant que celui-ci chérie cette femme qu'un lieutenant anglais force à marier comme il commande ses troupes coloniales. Quand le souffle romanesque s'allie à une épopée historique prenante et à une maîtrise technique moderne mais respectueuse de son sujet (Michael Mann) vous obtenez là, l'expression d'une sublimation de ce tout ce qui nous fait aimer le cinéma. La séquence finale, entre orgie martiale et ultime exutoire contre la haine, arrivera à point nommé pour vous rappeler que vous étiez en train de passer un vrai moment authentique de cinéma. Dans le fond, et intellectuellement dit, Le Dernier des Mohicans est un véritable phénomène paroxysmique en matière d'universalité du sentiment.



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Le Viager (Pierre Tchernia (1972)

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Idée de génie de Pierre Tchernia, que d'ironiser sur les rapports à l'argent et sur l'importance de l'intérêt matériel dans les relations humaines. La moquerie emprunte les chemins du burlesque, réunissant des acteurs qu'on adore voir en bande comme cela : Michel Serrault, Michel Galabru, Jean Carmet, avec la présence mince de Paul Préboist. Du beau monde pour de belles mimiques et une belle satire des rapports à l'argent.

Pitch            

Un homme au bord de la retraite, seul, sans amis et terriblement mal au point de vue santé (M.Serrault), accepte de vendre en viager sa magnifique maison à St-Tropez à son médecin (M.Galabru) et son beau-frère. Ces derniers visent en effet à ce que cet homme crève, et que la maison leur revienne de plein-droit. Sauf que l'homme vieillit et vieillit...et eux aussi...

Michel Serrault ne force pas trop son talent pour incarner ce jeune retraité à bout de souffle qui, par malheur pour son médecin, reprendra du poil de la bête. Autant dire tout de suite combien on jubile devant ce retraité qui dix ans après avoir fait jurer à son Galabru de médecin qu'il crèverait bien vite, se prend à jouer du sifflet à tout bout de champ et à taper dans un ballon de football avec une énergie à rendre blafard ses hôtes. Et ce au milieu d'une ribambelle de gosses avec lesquels il se confond facilement tellement ce « vieux » paraît en pleine forme !

Ses hôtes sont là pour lui rendre de petits visites impromptues, qui régalent le vieil homme, tout heureux de voir combien il a enfin des amis. Sauf qu'ils ne passent pas par hasard : cette maison ce devrait être déjà la leur, alors pourquoi qu'il crève pas le vieux !! Michel Galabru est somptueux dans son jeu de manipulateur véreux qui promet et promet les diagnostics fatals les plus fous à sa famille, alors que celle-ci ne fait finalement que s'exaspérer d'avoir signé un viager indexé sur le cours « inflationniste » de l'aluminium. Ils souhaitent la mort de ce retraité un peu trop « vivant » à leur goût, mais à chaque fois qu'ils lui rendent une visite, celui-ci les prend en affection presque maladive : le contraste entre les attitudes est génialissime et cela donne des séquences burlesques qui n'ont pas besoin de voir Galabru ou Michel Serrault forcer leur talent pour faire rire le spectateur.

Et puis la narration est assumée avec une modestie espiègle et ironique par le réalisateur Pierre Tchernia, et avec son montage de séquences fumeuses sur lequel il impose sa patte de chroniqueur et de journaliste. Cela donne une belle tranche de vie qui mènera depuis les années 30 jusqu'à la fin de la Seconde guerre mondiale. La caricature des mouvements et forces en place pendant la guerre, et l'utilisation de ces éléments au service de l'humour, amène le film à être vraiment plaisant à regarder. On reste certes parfois dans du grossier, mais c'est cette démesure dans certains personnages comme Serrault qui, contrastée avec le côté « à fond » d'autres personnages terriblement austères, offre un gouffre dans lequel le spectateur tombe pour en rire et sourire à tue-tête. Du cinéma simple, qui fait plein feu sur le sens de la comédie de deux véritables lascars : Galabru et Serrault. Dans un humour qui grâce au burlesque, ne prend pas une ride depuis les années 70, et sur un thème et une exploitation du thème tout simplement modernes. A voir, et à revoir : une comédie indémodable !



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Les Dents de la Mer (Steven Spielberg -1975)

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Réunissant presque tous les moyens de sa production sur la reconstitution mécanique d'un « grand requin blanc » et faisant le reste grâce à son sens de la caméra à suspense, Steven Spielberg stupéfiait son monde, en 1975, lorsque les Dents de la Mer débarquait dans les salles obscures. Combien n'ont-ils pas fait des cauchemars après ? Combien ne regardaient-ils pas à deux fois le fond de l'eau, lorsqu'il s'apprêtait à nager un peu plus loin de la plage ? Film franchement réussi dans son genre et qui reste inégalée : ses suites et ses « ersatz » (Peur Bleue par exemple), n'avaient plus rien à inventer, Spielberg avait déjà tout fait avec brio... C'est un coup de chance pour lui, quand on sait qu'il a du monter des plans subjectifs depuis le requin ou des plans de futures victimes, car ne pouvant profiter à sa guise des deux requins animatroniques conçus en polyuréthane.



Pitch                                            

Amity Ville est une station balnéaire tout ce qu'il y a de plus coquet, sur la côte est des Etats-Unis. Pour le chef de la police locale par contre, ce cadavre mutilé d'une jeune femme, échoué sur les plages, à quelque chose d'inacceptable : il faut interdire la baignade. Sauf que Monsieur le Maire a bien l'intention de faire ses emplettes, le jour de la fête nationale approchant. Il faudra le convaincre de renoncer à l'ouverture des plages. Compte tenu de l'autopsie pratiquée par un chercheur de l'Institut d'Océanographie sur le corps de la jeune femme, il est clair qu'il s'agit de l'attaque d'un « grand blanc » d'au minimum 7 mètres. Lorsque les attaques se multiplient malgré la pêche d'un grand requin Maco, le Maire est dans l'obligation de signer l'embauche d'un marin-pêcheur chevronné.


Les Dents de la Mer c'est un peu ces images chocs qui vous restent gravées dans la rétine : ce matelas pneumatique déchiquetée baignant dans son sang, et que la marée rapporte sans son gosse de propriétaire sur le sable fin, mais aussi cette jambe gauche sectionnée, allant sombrer au fond de la mer après une attaque monstrueuse. Il y a aussi cette femme qui prise entre la double rangée de dents d'un requin, se voit balancer de gauche à droite d'une façon étrange et violente à la fois. Âmes sensibles s'abstenir !


Non vraiment, les Dents de la Mer avait de quoi choquer son monde à l'époque de sa sortie. C'était du jamais vu ! Steven Spielberg s'était montré très habile quant à masquer la bête le plus longtemps possible, comme pour mieux maintenir en haleine le spectateur on croirait. Alors qu'en fait c'est le résultat de problèmes techniques : ses deux faux requins de 1 tonne 5 chaque, ne fonctionnaient comme prévu. Quelle chance : cela lui permit de durcir l'intrigue autour de la bête !

La première fois qu'on le voit c'est bien dans le lac, avec ce pauv'gars qui demande au fils du policier en chef si « ça va comme vous voulez ? ». Sa jambe gauche parlera pour lui. Quant au gamin, traumatisé, son cas permettra de décider d'en finir pour de bon avec ce requin qui a décidément fait des plages d'Amity Ville son terrain de chasse.


Si la première partie du film ne veut jamais dévoiler la nature de la bête, en maximisant plutôt l'atteinte physique et psychologique sur ses victimes, idéal pour garder le spectateur alerte de bout en bout, il enchaînera ensuite sur un grand moment de cinéma : la chasse au prédateur, avec tous les outillages susceptibles de le capturer. C'est-à-dire qu'après avoir ménagé sa bête du spectateur, Spielberg décidait enfin de nous la dévoiler, et de la mettre aux prises directes avec trois hommes volontaires, connaisseurs et très remontés. En guise d'entrée en matière, voilà que Quint, le capitaine du bateau (Robert Shaw) narre avec froideur l'épisode du massacre d'une partie de l'équipage de l'USS Indianapolis par des requins durant le naufrage du navire en 1945 au sud de l'Océan Pacifique. Histoire vraie du convoyage de la bombe atomique, pour une opération ciblant Hiroshima. « On avait largué la bombe », qu'il dira avec un sourire de façade. Spielberg n'allait plus jamais démordre avec la Seconde guerre mondiale, qui le fascine depuis tout gosse, lorsqu'il montait ses premiers courts-métrages sur le thème du combat, avec la caméra de papa...


Ces séquences-là sont vertigineuses : en plein océan, à bord d'un chalutier, les trois traquent un grand blanc de 7 mètres jusqu'à un point de non-retour. A partir du moment où c'est la bête qui les traquera, je vous laisse imaginer le type de suspense fantasmagorique dans lequel nous nous retrouvons plongés pour de bon. Certes le capitaine du chalut, Quint, s'enorgueillit d'avoir capturé les plus beaux spécimens de squales de la côte, mais Spielberg a été très futé pour doper son suspense : aucun des trois acteurs n'est connu à l'époque. Robert Shaw était un fidèle acteur des rôles secondaires de chiens de meute de la Seconde guerre mondiale (La Bataille des Ardennes -1965-, La Bataille d'Anglerre -1969-), Roy Scheider avait raté d'un cheveu l'oscar du meilleur second rôle dans French Connection (1971), Richard Dreyfuss venait de se faire une bonne notoriété d'acteur dans Dillinger (1973). De quoi baigner le spectateur dans son jus : lequel allait résister au requin ?












La lutte des égos allaient faire place à la lutte, tous ensemble face à la bête qui promettait leur mort. Une force scénaristique intégralement placée au service de la torpeur du spectateur. Les Dents de la Mer reste bien au-delà d'un film d'horreur de luxe, il a quelque chose d'indéfinissable, au même titre que E.T. dans le genre SF. Mais que voulez-vous, les Spielberg et autres Georges Lucas n'étaient-ils pas les dépositaires d'un nouveau courant cinématographique en leur temps ? Le courant de la puissance de l'image...



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Le Héros de la famille (Thierry Klifa -2006)

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Tout ça pour ça ! Cette réunion de stars de cinéma autour d'un testament, pour une telle absence de scénario par la suite ! Autant de noms au casting pour une négation du cinéma !




Pitch                      Gérard Lanvin, Michaël Cohen et Géraldine Pailhas. Luc Roux / UGC

Le décès du propriétaire d'un cabaret niçois précipite les retrouvailles des membres d'une famille.

Emmanuelle Béart. Luc Roux / UGC

Aucune envolée dans les interprétations. Aucun rythme dans l'intrigue. Aucune étincelle dans les rencontres entre ces acteurs desquels on attend infiniment plus. Ce film choral rejoint la plupart des autres de son genre, ceux où chaque star est mise sous l'éteignoir dans leur mise sous les projecteurs fade ou alors zappeuse. De Miou-Miou à Claude Brasseur, en passant par Gérard Lanvin, Catherine Deneuve, Emmanuelle Béart et Géraldine Pailhas, vous aviez avec Le Héros de la famille, les ingrédients d'un bon cinéma. Mais au contraire, vous n'avez rien.

Des insignifiances d'histoire pour amener des stéréotypes, des interprétations à la limite du monolithique. Le manque d'envie et d'inspiration fait presque suggérer qu'ils sont tous là pour empocher leur cachet. Le dénouement final est à l'image du film : il n'existe pas. On en sort déçu, quand on savait la renommée des acteurs présents : on vogue d'insignifiances en insignifiances mais on reste quand même jusqu'au bout parce qu'on se dit que « c'est pas possible », « pas à ce point-là » ?!? bah si !



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Public Enemies (Michael Mann -juill.09)

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Universal Pictures International FranceMichael Mann parvient tout juste à associer le fond à la forme. La forme, virtuose, se risque parfois à écraser les interprétations et les sentiments. Ensuite par contre, le film monte en puissance, remarquablement desservi par la prestation de Johnny Depp, acteur aux talents indispensables. Un grand film pour un mois de juillet !

Pitch                            
Basé sur l'histoire vraie de John Dillinger, un braqueur de banque hors pair qui a sévi à de nombreuses reprises dans l'Amérique des années 30. Avancé comme "l'ennemi public numéro 1" par le patron du FBI, John Edgar Hoover, Dillinger sera traqué sans relâche par Melvin Purvis, l'un des agents fédéraux des plus efficaces.

 

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Johnny Depp et Marion Cotillard. Universal Pictures International FranceLes vingt premières minutes sont superficielles, car les acteurs semblent n'être que dans du vidéoclip, zappés qu'ils sont par la caméra nerveuse de Mann. Le montage zappe trop, à mon goût, l'éclosion de l'histoire d'amour entre Dillinger et Billie Frechette : en clair c'est superficiel et semble arrangé pour mieux ménager la nervosité du scénario. Mais au change, on perd quelque chose. Michael Mann aurait bien fait, que de consacrer 15 minutes supplémentaires à ce couple, ne serait-ce que pour justifier les larmes qui viendront. Car le côté « love pour le pire et pour le pire » de ces deux acolytes ne se résume qu'à un pseudo fil rouge du film, incarnant le côté humain voire normal de ce film par ailleurs outrageusement peuplé de sales gueules. Parce que pour une histoire d'hommes, Public Enemies en est une ! Quoi qu'on en dise, Marion Cotillard joue les seconds rôles.

Matt Craven. Universal Pictures International FranceAmerican Gangster avait réussi là où Public Enemies réussit à peu près : combiner dans une même intrigue, le point de vue de l'homme à abattre et de celui qui le pourchasse. Mais la comparaison s'arrête là : Michael Mann manque cruellement la reconstitution d'une ambiance « années 30 », là où Ridley Scott avait la chance de traiter d'une époque beaucoup plus proche de nous. Les costumes, les chapeaux borsalino, les coiffures, les bretelles et les machine guns, c'est une chose indiscutablement intéressantes car d'époque, mais que Mann soit en mode focus sans arrêt dès qu'il faut filmer un habitat, une rue ou un immeuble, c'est une autre chose qui empêche le spectateur de s'imprégner tout-à-fait du contexte. Alors il va sans dire que sans un réalisme sentimental ni une reconstitution aboutie d'une ambiance, Michael Mann peut très bien se montrer virtuose derrière la caméra que cela ne fait que lui faire rattraper des points perdus. Je rassure tout de suite, dans Les Incorruptibles, la reconstitution était certes plus pointue, mais ce n'était pas cela non plus. C'est à croire qu'au cinéma, ces années 30 de débauche et de libertés fascinent autant qu'on ne les comprend toujours pas.

Johnny Depp. Universal Pictures International FranceÉclosion de l'enquête scientifique, démonstration des nouvelles méthodes d'interrogatoires, armement lourd des agents : le FBI de Monsieur Hoover prenait son envol. Ce côté historique sur Hoover et le FBI, né de la confrontation avec le grand banditisme et la contrebande, est très agréable à suivre, bien que tout soit clippé, comme saupoudré tout au long du film. De même, la vie de John Dillinger, le plus grand braqueur que l'Amérique n'ait jamais porté dans ces années de prohibition, est somme toute fascinante à suivre. Le personnage en vaut la chandelle. Et quand c'est Johnny Depp qui en est l'interprète, vous comprenez qu'un tel film, basé sur ce héros « noir », ne peut qu'être réussi. Même si je minore le rôle constructif de Michael Mann, dans la profondeur du film, il est évident que ses talents donnent un coup d'accélérateur dans bien des détails du scénario. Le film séduit. Convainc-t-il ?

Christian Bale. Universal Pictures International FrancePublic Enemies peut laisser insensible, car de facture terriblement US : donnant la priorité au choc de l'image (notamment des séquences de fusillades sans noms, qui décidément continuent de démontrer que Mann est le spécialiste du genre), à la forme et au montage, il en oublie de se reposer un peu sur le talent de Christian Bale ou Johnny Depp. Dommage, car l'idée de leur confrontation ne reste qu'une idée. Les traits humains de ces deux personnages sont étouffés. Ne cherchez pas de pause sentimentale, ni d'attaches à ces personnages demeurant loin de nous, ni de réalisme cru ailleurs que dans les gunfights, Public Enemies est un film qui se veut beau.

Mais doit-il être considéré comme bon ? J'aimerai bien dire oui, mais... Mais pourquoi n'ai-je pu rire lorsque Dillinger balance aux journalistes que c'est un jeu d'enfant de braquer une banque, et que cela se fait en 1 min 40. Pourquoi la relation amoureuse entre Cotillard et Depp ne fait ni chaud ni froid. Pourquoi le combat mené par l'agent incarné par C.Bale me laisse-t-il insensible ? Et bien sûrement parce qu'à force d'user d'une caméra qui n'a rien de commun avec un œil humain, et bien on n'y croit plus. Un beau film donc.

 

 

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L'Armée des Ombres (Jean-Pierre Melville (1969)

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L'armée des ombres (4)
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<< Je l'ai porté en moi 25 ans et 14 mois exactement. Il fallait que je le fasse et que je le fasse maintenant, complètement dépassionné, sans le moindre relent de cocorico. C'est un morceau de ma mémoire, de ma chair. Dans ce film, j'ai montré pour la première fois des choses que j'ai vues, que j'ai vécues. Toutefois, ma vérité est, bien entendu, subjective et ne correspond certainement pas à la vérité réelle. D'un récit sublime, merveilleux documentaire sur la Résistance, j'ai fait une rêverie rétrospective; un pèlerinage nostalgique à une époque qui a marqué profondément ma génération. >> Jean-Pierre Melville


Pitch                                                  

France, 1942. Gerbier (Lino Ventura), ingénieur des Ponts et Chaussées, est également l'un des chefs de la Résistance. Dénoncé et capturé, il est incarcéré dans un camp de prisonniers. Alors qu'il prépare son évasion et sa vengeance contre celui qui l'a dénoncé, il est récupéré par la Gestapo...


Lino Ventura. StudioCanalL'Armée des Ombres c'est l'hommage de Jean-Pierre Melville aux Résistants. Quand vous savez cela, vous comprenez aussi la puissance du film, tant humaine que bestiale. Son savoir-faire se place au service d'une poigne dramatique, qui brosse dans le dédale du fatalisme nazi, le portrait de quelques uns, mal armés, mal équipés, qui sont prêts à tous les sacrifices pour continuer leur combat pour la liberté. Si Lino Ventura est d'entrée de jeu sublimé, pratiquement mis sur un piédestal. Il en redescendra bien vite. C'est d'ailleurs ce contraste entre ce qu'il est, et ce que les Allemands veulent faire de lui, qui est saisissant. Homme de l'ombre qui ne se suffit pas de lui-même, au sein d'un réseau de résistants, le voilà qui entonne à ses camarades combien il est prêt à se lancer en première ligne.

Simone Signoret. StudioCanalMais un chef de la Résistance, ne l'est plus le lendemain où il s'érige comme tel. Fiché, répertorié et recherché par les Nazis, ce n'est pas son courage que peuvent saluer ses camarades résistants, mais le danger qu'il fait courir à tous en se montrant, en prenant les devants. Triste portrait à poigne, que brosse Melville, de résistants qui contre l'occupant, sont bien faibles partout sauf dans leur coeur. Capables d'avancer souvent isolés les uns des autres. Mener un même combat oblige aux sacrifices. Pour le combat même, pour qu'il dure, il faut parfois être prêt à liquider des associés que l'on doit renier ou tuer pour ne jamais être pris à son tour. Formidable moment de cinéma que cette Simone Signoret, qui d'un bout à l'autre du film, passera de la stature d'un grand cerveau, capable et besogneux, une vraie bonne femme, à la faiblesse de ses sentiments qui la trahiront elle et tout son réseau.

La profondeur de champs exercé derrière la caméra par Melville est là pour mieux suggérer la petitesse d'un combat face à l'ogre, en même temps que son intensité. Tous groupés, quand il le faut. Des opérations commandos au repli telle une bête traquée, dans sa cachette pour longtemps, sans laisser une once de signes de vie aux Allemands, et vous avez là le plus beau portrait cinématographique jamais tenté sur la Résistance. Et quand on apprend avec eux, à se méfier, à ne plus respirer trop fort, à se délester avec eux de ce qui nous appartient et nous a fait, en tant que spectateur, alors le spectacle déchire toutes les conventions. Il prend aux tripes !

Ils n'étaient pas considérés comme des éléments de guerre majeurs par les Britanniques, ils luttaient quand même. Ils ont défié la raison même de leur existence pour une cause plus haute, au prix de bien des sacrifices. L'Armée des Ombres conte tout cela à la fois, avec la froideur qui devait enserrer ces années de luttes, avec cette retranscription vertigineuse de la vie clandestine sous la guerre. Des hommes quoi, on le savait ! Sauf que Melville leur rend hommage ! En montrant comment leur nature humaine est forcée, violentée, happée voire hachée menue. L'humain est là non plus conventionnellement, mais dans son paroxysme. Entre pulsions de survie et refoulement de ses sentiments. Ce ne sont pas des bêtes, simplement des hommes qu'on a poussé au bout et qui ne peuvent plus revenir en arrière. Leur mise en avant par Melville force la normalité elle aussi. C'est la rencontre entre un sujet ambitieux du cinéma et d'un réalisateur tellement doué et hanté par la chose, qu'il en arrive à en respecter les moindres méandres. Touchant, émouvant, brillant !



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No Country for old men (frères Cohen -2007)

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Paramount Pictures France









Transposition moderne du western, No Country for old men démontre une fois de plus combien les frères Cohen en ont sous la semelle. Choisissant délibérément d'associer leur pathos grotesque à la violence physique, ils s'offraient là quatre oscars mérités. Tout simplement parce que No Country for old men est un véritable univers autonome, un cadre "rêvé" pour du grand cinéma.


Pitch

Javier Bardem. Paramount Pictures FranceTexas. 1980. Au cours d'une chasse et en remontant la piste d'un gibier qu'il a blessé, un homme tombe fortuitement sur un cimetière de voitures, avec à leur bord des cadavres et un homme mourant. En aucun cas le résultat d'une partie de chasse qui aurait mal tourné, non. Sur un pick-up au conducteur agonisant, trônent des paquets d'héroïne par dizaines. Un peu plus loin c'est une valise bourrée de dollars qu'il trouve, empoigne et embarque avec lui. Oui, sauf que ce fric, quelqu'un veut le retrouver et embauche pour ce faire un véritable bourreau : un tueur à gages qui filera sans relâche l'heureux détenteur de la valise.


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Hypnotisme du grand vide désertique. Chapeaux et santiags. Malette et portes-flingues. L'univers dépeint par les frères Cohen est adapté du roman de Cormac McCarthy. Totalement incarné, ce grand vide de la frontière mexicano-américaine ne fait finalement pas revivre un monde de solitaires et de forçats du dollar, il n'est pas non plus tout-à-fait une transposition moderne du western. No Country for old men fascine d'entrée de jeu de par la trivialité simple de son élément perturbateur, qui frappe le spectateur d'entrée de jeu, pour entraîner à sa suite, une cascade de perturbations sans fin. On y entre spectaculairement, pour demeurer en haleine de bout en bout, grâce à un scénario des plus simple et en même temps des plus forts en gueule.

Paramount Pictures FranceQue Josh Brolin soit un acteur mineur utilisé pour sa gueule, que Javier Bardem soit obligé de composer un personnage sans aucune humanité, empêche certes le spectateur de s'identifier à l'un d'eux, mais le rapport à l'argent en sort d'autant plus accentué. Et finalement ça, tout le monde y trouve un attachement ou y place ne serait-ce qu'une dépendance matérielle. Alors entre un chasseur dont la spécialité n'est pas de protéger un magot, et un bougre dont le hobby consiste à réduire le sort d'une personne à pile ou face et dont la profession est de tuer sur parole, il est évident qu'on ne choisit pas le camp du bougre. Alors que pour être heureux, le spectateur devrait justement placer ses espoirs dans ce tueur antipathique... Parce que pour ce qui est du shériff, incarné par Tommy Lee Jones, cela flirte un peu avec la shériff impuissante (sauf dans son ultuime sursaut) de Fargo.

Paramount Pictures FranceToute la réussite des frères Cohen tient donc à un vrai savoir-faire en matière d'ironie : prendre le spectateur en étau entre un faible qui leur plaît, et ce fort qui déplaît. Ce dernier n'a aucune humanité en laquelle espérer. Et dans ce registre là, les maestro du grotesque, du ridicule qui ne tue pas, que sont les frères Cohen, n'en avait pas besoin de plus de violence physique et bestiale que cela pour associer de manière inexpurgeable l'image à l'intrigue. Javier Bardem a du d'ailleurs passer, de force, chez le coiffeur, de quoi avoir la gueule de l'emploi.

Paramount Pictures FranceDu bon cinéma, qui n'a pas besoin de trop montrer pour raconter, et qui n'a pas besoin de trop raconter pour justifier ses images. Finalement, il n'y a pas d'esthétique. Il n'y a pas de fond. Il y a un petit fond et une petite forme épurée qui se subliment l'un l'autre, pour donner une âme à un univers rendu autonome. Du vrai cinéma, sans filouseries. Du cinéma cash !

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Tellement Proches (Olivier Nakache/Eric Toledano -juin09)

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Mars DistributionTellement Proches réunit une belle palette d'acteurs, tous plus à fond dans leur personnalité les uns que les autres. Heureusement que cette comédie incorpore deux rôles plus matures, plus sérieux que les autres : les rôles d'Omar Sy et de Isabelle Carré sont en effet des personnages auxquels le spectateur peut s'identifier et s'accrocher...au beau milieu d'un déluge de forts caractères relativement loufoques dans leur genre. Cette comédie est donc réussie, mais n'est pas forcément une franche rigolade, en tout cas moins que Nos Jours heureux, le second long-métrage du duo Eric Toledano et Olivier Nakache.

Pitch                                                  

Famille : Groupe de personnes réunies par des liens de parenté et un fort sentiment de solidarité morale et matérielle. Quand Alain a épousé Nathalie, il ne savait pas qu'il épouserait aussi sa famille. Ce samedi, comme toutes les semaines, ils sont invités à dîner chez son beau-frère, Jean-Pierre à Créteil. Mais ce soir, plus que d'habitude, Alain est à bloc, il bout comme une cocotte prête à exploser. Il en a marre, marre de se planter à chaque fois sur le chemin pour aller à Créteil, marre de se taper les petits conseils de vie de Jean-Pierre et de sa femme Catherine qui élève ses enfants comme des chevaux, marre d'attendre de dîner l'estomac vide en regardant les spectacles soporifiques de leur fille Gaëlle, marre de regarder pour la énième fois la vidéo de leur mariage, marre aussi de son autre belle-soeur Roxane, qui, affolée par son horloge biologique, a jeté son dévolu sur Bruno, jeune interne en médecine qui se demande un peu comment il a atterri à ce dîner. C'est vrai, Alain en a marre de ces dîners familiaux, mais il ne sait pas encore ce qui l'attend véritablement ce soir-là... Ni les jours qui suivent


François-Xavier Demaison et Vincent Elbaz. Mars DistributionVincent Elbaz est-il de retour ? Celui qui avait dit non à la suite de la Vérité si je mens, avait montré là le signe de ne pas rentrer dans une case. Sauf que son choix n'avait pas été suivi d'un franc succès. Remarquez, hormis le déjà reconnu Anconina, les autres acteurs de l'opus 1, ne s'étaient pas non plus ouverts les portes de la gloire. Vincent Elbaz fait donc plaisir à voir. Le charisme est là, aidé par sa carrure de trentenaire bedonnant, sa belle gueule et sa spontanéité remarquée.

Omar Sy. Mars DistributionAutour de lui se réunissent deux acolytes du fameux Nos Jours heureux : Omar Sy et Joséphine de Meaux. Ces deux-là, décidément, semblent cantonner à ne se retrouver dans un film que pour se forcer à s'aimer. Un peu la faute à cette De Meaux, qui maintient la ligne dure et caractérielle de son rôle de “coincée qui se décoince en gueulant ou en devenant folle de rage”. Qu'à cela ne tienne, lorsqu'elle ressort son grand jeu de l'accélération soudaine dès lors que son Omar Sy la contrarie, on ne peut que rire de ce qui attend ce dernier, au tournant. En guise de tournant c'est plutôt une ligne droite : être largué sur une autoroute, c'est un peu dur à encaisser. Mais bon, s'il veut rester en médecine à Paris, il doit prouver qu'il est en concubinage avec une...Parisienne ! Il “tient donc à elle”, sous réserve tout de même qu'il finisse par en tomber amoureux...


Isabelle Carré et Vincent Elbaz. Mars DistributionL'ensemble de cette réunion de famille a elle aussi quelque chose d'arrangée ! Parce que sa dame (Isabelle Carré) est très, très proche de son frère, Vincent Elbaz doit se coltiner ces ronds de table à la mord-moi-le-noeud, où face à la petite protégée du beau-frère, qui joue autant d'instruments qu'elle joue mal, ne peut qu'opposer que son rejeton espiègle, turbulent voire violent, mais qu'il aime à en mourir. Et son couple devient celui d'un père et son fils, la mère restant un peu trop mère, et plus assez femme à ses yeux. C'est peut être pour ça que Vincent Elbaz campe un père qui ne force pas trop ses charmes, en reniflant de trop près la moindre baby-sitter qu'il embauche pour garder son rejeton. Crise de la quarantaine approchant ou pas, l'homme a décidément besoin de séduire. En face, une Isabelle Carré en béton armée qui sauve littéralement le film de la petite comédie de passage. Ouf ! Cette once de sérieux en elle, permet à ce tableau grivois de deux familles qui tentent de s'apprivoiser, de sortir des chemins battus d'une comédie qui aurait pu rester dans la légèreté. Elle ne bronche pas, elle tient bon, et permet au spectateur de croire très vite à une certaine réalité certes extrême, mais identifiable.


Isabelle Carré, Joséphine de Meaux, Vincent Elbaz, Omar Sy, François-Xavier Demaison et Audrey Dana. Mars DistributionTellement Proches utilise formidablement bien les quelques ressources dont il dispose : les simagries, la gestuelle et la réthorique de François-Xavier Demaison par exemple, sont idéal pour nuancer le rôle de l'épouse de celui-ci : interprétée par Audrey Dana (Welcome). Tous les personnages sont associés sur un manège qui tourne et rend heureux ceux qui rendent malheureux les autres. Mais la roue tourne, tant mieux ! Et cela va jusqu'où comme ça ? Et bien malheureusement, la cadence n'est pas maintenue, le film s'essouffle. Le côté dramatique qui avaient fait respirer le spectateur parfois, va monopoliser les dix dernières minutes. Ce qui fait que le dénouement final semble bien superficiel, il semble tout droit débarqué d'un téléfilm pour une chaîne publique, et qui bien que surprenant son spectateur, n'en montre pas moins le signe d'une arrivée en bout de course. Dommage !



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