Shutter Island (de Martin Scorsese avec L.Di Caprio et M.Ruffalo - mars2010)
Une île embrumée peuplée de
renégats dont la société doit être écartée à tout prix. Leonardo Di Caprio en
interprète convaincant, un Mark Ruffalo qui légale toute proportion gardée de
lapparition à lécran, un Martin Scorsese à la réalisation ! Oui sauf que
ce dernier ne convainc guère dans ce genre cinématographique.
Pitch
Pour un pareil film le mieux est de ne pas en dire trop, ce qui prive
mon écriture de bien des champs de critiques possibles et imaginables. Restons-en
aux faits. Leonardo Di Caprio sublime une uvre dont le dénouement final a bien
fait de tout dire. Sans quoi Scorsese aurait réalisé un non-film, ou plutôt
aurait-il créé un divertissement juste moyen.
Deux lectures sont apposées sur ce long-métrage : celle dune vision intérieure, celle dune version extérieure respectivement contractée dans et sur un seul et même homme. Ces deux axes de lecture ne se rejoignent que dans le dénouement final, et dici là le spectateur assiste à un spectacle, certes bon, mais ressemblant à un film dépouvante de luxe. Martin Scorsese aurait-il donc voulu réaliser un film dépouvante ?! Cest à croire jusquà ce quil ressorte en toute fin, son film du guêpier de la série B.
Scorsese génère de par ses limites
de réalisateur percées au grand jour par ce genre cinématographique, une belle
série B, luxueuse. Il utilise à merveille sa complicité avec Di Caprio, mais ce
nest plus lui qui sublime ses acteurs, mais Di Caprio qui porte lensemble du
film et de ses intérêts sur ses épaules dacteur. Martin Scorsese démontre ses
limites dans ce registre quil a tenté ici même.
Incapable de noyer lune dans lautre, ces deux lectures concomitantes et liées aux mêmes causes à effets, Scorsese propose un cinéma juste moyen pour ce registre. Agréable et percutant, son style de caméra enrobe dentrée de jeu le spectateur. Mais dans le fonds, il signe le début de sa propre fin en tant que réalisateur. Shutter Island est un ensemble de visions, de voix entendus dans les têtes, qui tel un soufflet retombe lorsque tout est expliqué de manière totalement discursive. Soit deux types de films combinés en un seul. Le discours sauvant la méthode in extremis !
Un délire de réalisateur. Shutter
Island est un jouet que Scorsese aurait manipulé dans tous les sens sans en
trouver la bonne utilisation
Il lui a
donc fallu tout dire à la fin pour sauver son film. Grosse déception que
Shutter Island : car la version intérieure méritait tellement meilleur
dénouement final. Scorsese a malheureusement choisi de faire ressortir le moins
convaincant des deux axes de lecture. Lautre, beaucoup plus noir, aurait
mérité meilleur traitement : le noyer davantage dans lautre axe, lui
donner en fin de film un sauf-conduit honorable par exemple.
Quand un très grand cinéaste naurait
jamais osé se coller à un tel projet de film hypnotique, Scorsese la
malheureusement tenté, en affichant au grand jour ses lacunes. Terrible de constater par exemple, que Martin Scorsese a fait moins bien que le réalisateur
débutant Ben Affleck (Gone Baby gone), lorsque celui-ci aussi avait adapté
une nouvelle du grand Dennis Lehane ! Pourtant maître dans l'art d'adapter des scripts sur grand écran, Scorsese n'a pour tout dire pas même cru bon de choisir un point de vue spécifique. Dommage !