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comedie noire

Sans filtre (de Ruben Östlund, sortie le 28 septembre 2022)

Publié le par Frédéric Coulon

Pitch :

Un couple formé d'un mannequin (Harris Dickinson) et d'une influenceuse (Charlbi Dean Kriek), se retrouve embarqué sur un navire de croisière de luxe, et découvre un monde de parvenus enrichis par la vente d'armes ou d'engrais, et où les femmes entretenues par les milliardaires tiennent un rôle décoratif. Le repas du capitaine (Woody Harrelson), au milieu d'une tempête, tourne au cauchemar, au naufrage. Une petite dizaine de rescapés se retrouve sur une île semblant déserte. Les milliardaires ne sachant rien faire de leurs dix doigts, Abigail, la préposée aux WC du yacht s'autoproclame capitaine, puisqu'ils dépendent d'elle pour trouver de la nourriture, faire du feu et cuisiner.

Avis :

Ruben Östlund avait reçu la Palme d'Or à Cannes, pour The Square, en 2017. Il réédite cet exploit surfait au Festival de Cannes 2022 avec ce Sans Filtre, pour un Festival qui se rattrapait en quelque sorte, concernant le cinéma dénonciateur et subversif qu'il avait pourtant hué et vomi le 17 mai 1973 lors de la projection en compétition officielle, de La Grande Bouffe, de Marco Ferreri, film jugé alors obscène, licencieux et pornographique.

Interviewé par la presse pendant le festival de Cannes de 1973, Marco Ferreri avait expliqué avoir voulu faire un film non pas psychologique mais "physiologique" pour dénoncer ce qu'on commence à appeler à l'époque "la société de consommation". Eh bien justement, Ruben Östlund propose un film très physiologique lui aussi, pour dénoncer là, les ultrariches, puisque ses poupées de cire qui lui servent d'acteurs/comédiens/actrices/comédiennes semblent bel et bien désincarnées, puis asséchées lorsque le naufrage a eu lieu. Pour un film en deux temps : les deux premiers tiers filmant ce luxe obscène à bord du yacht et ces mentalités de milliardaires totalement déconnectées des simples gens (par exemple déconnectées de la mentalité du personnel d'équipage) ; le second temps étant un dernier tiers qui fait plonger Ruben Östlund dans du cinéma tout aussi caricatural mais façon série LOST (une île, quelques rescapés et une inversion de la détention du pouvoir au sein des classes sociales présentes selon son habilité à se rendre utile pour les besoins vitaux de la petite communauté des rescapés).

Soit une approche simpliste d’une lutte des classes, certes actualisée par un réalisateur talentueux, et parfois provoquant (j'ai été plongé entre attente surtout, ennui, et parfois malaise, durant le visionnage des deux premiers tiers de ce film). Le luxe obscène qu’il dénonce, ces milliardaires sans savoir-vivre qu'il dénonce, ces métiers inutiles sans savoir-faire qu'il dénonce (mannequin, influenceuse), est parfois jouissif à visionner jusqu'au naufrage. Lors du naufrage, ce cinéma atteint le paroxysme de son aspect physiologique (vomissements de milliardaires en cascade, traits d'humour sordides), de son aspect désincarné : les poupées de cire d'acteurs/actrices sont mises à l'amende pour l'outrance de leur vie passée face à cette fin soudaine mais longue à la fois (ce naufrage)...longue puisque Ruben Östlund étire ses plans à l'extrême en filmant :

  • l'enivrement de ces ultrariches,

  • le mal de mer de ces ultrariches,

  • des plans-séquences d'humours sordides,

  • de longs vomissements à même la table,

Le tout dans le décor d'un yacht brinquebalant de part en part, ce qui amène là le seul vrai moment d'humour caustique durable et réussi, de tout le film. D'ici ce naufrage vous assisterez à du relationnel caricatural, superficiel entre ultrariches entre eux, ultrariches et personnels d'équipage.

Là où Marco Ferreri avec La Grande Bouffe, avait réussi une forme de dénonciation de la société de consommation en 1973, Ruben Östlund nous pond une critique bien pâlichonne des ultrariches.

Dans le fond, Sans filtre, et sa Palme d'or 2022 totalement surfaite, c'est tout Cannes, c'est tout ce qu'est devenu le Festival de Cannes maintenant : devenant le théâtre de verdure d'un cinéma chic et choc à la fois.

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Le Bruit des glaçons (Bertrand Blier - août10)

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Cancer est peut-être un des derniers mots sur lequel il est difficile de rire. Mais avec Bertrand Blier et un duo comme Dujardin et Dupontel…le Bruit des glaçons ne peut tomber dans l'oreille d'un sourd.



 

Pitch   

C'est l'histoire d'un homme qui reçoit la visite de son cancer. " Bonjour, lui dit le cancer, je suis votre cancer. Je me suis dit que ça serait peut-être pas mal de faire un petit peu connaissance... "


Albert Dupontel et ses « sales histoires » de jadis, colle bien à ce personnage atypique : un cancer. On l’y voit déjà. Espiègle, fouJean Dujardin, Albert Dupontel et 
 Bertrand Blier. Wild Bunch Distributionrbe, noir, brutal, froid, ce rôle aurait broyé assez sec bien des rôles principaux. Sauf qu’en face, Jean Dujardin s’emploie, pour naviguer entre le pathétique et l’autodérision. L’humour de son cancer, lui, reste clinique : « Je suis comme la m. au c. quand y a plus de papiers ».

Ce duo Dujardin/Dupontel permet de passer un bon moment, si on suit bien jusqu’au bout. Car l’entrée en matière laisse à désirer : dans quoi sommes-nous tomber ? L’ensemble des attentes de spectateurs naissent d’une fatalité, d’une annonce de mort. Pas drôle, évidemment. Jusqu’à ce que Bertrand Blier tourne autour de son étoffe, la manipule dans tous les sens, pour faire gicler humour, tendresse, cynisme et amour. 

Albert Dupontel et Jean Dujardin. Wild Bunch DistributionOn peut rire de tout avec Bertrand Blier. Et quelque part c’est rare dans le paysage actuel, aseptisé. Le septuagénaire effronté est de retour. Il sert la soupe à deux acteurs connus pour être bien dans leurs chaussures. Des gueules qui s’assument. Ces derniers envoient du bois. Quant au duo de miss, Myriam Boyer et Anne Alvaro, elles sont sublimes de caractère.

C’est noir mais ça finit rose. Alors pourquoi se priver, en plein été ?

 



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In the air (Jason Reitman -fév2010)

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Paramount Pictures FranceUn peu trop aérien ! Une pléiade d’occasions manquées en terme scénaristique, un rôle-titre qui ne méritait finalement pas son Oscar de meilleur interprète, In the Air restera bien le vent du boulet mais non le boulet. En l’absence d’étincelles, en l’absence de brio ou virtuosité, ne serait-ce qu’un seul instant, In the Air sera sans doute oublié rapidement…malgré tout ce lot de promesses et d’audaces.

 

Pitch                          

L'odyssée de Ryan Bingham, un spécialiste du licenciement à qui les entreprises font appel pour ne pas avoir à se salir les mains. Dans sa vie privée, celui-ci fuit tout engagement (mariage, propriété, famille) jusqu'à ce que sa rencontre avec deux femmes ne le ramène sur terre. Ryan Bingham est un collectionneur compulsif de miles aériens cumulés lors de ses incessants voyages d'affaire. Misanthrope, il adore cette vie faite d'aéroports, de chambres d'hôtel et de voitures de location. Lui dont les besoins tiennent à l'intérieur d'une seule valise est même à deux doigts d'atteindre un des objectifs de sa vie : les 10 millions de miles. Alors qu'il tombe amoureux d'une femme rencontrée lors d'un de ses nombreux voyages, il apprend par la voix de son patron que ses méthodes de travail vont devoir évoluer. Inspiré par une nouvelle jeune collaboratrice très ambitieuse, celui-ci décide que les licenciements vont pouvoir se faire de manière encore plus rentable, via... vidéo conférence. Ce qui risque évidemment de limiter ces voyages que Bingham affectionne tant...

 

George Clooney. Paramount Pictures FranceGeorge Clooney reprend en quelque sorte son petit rôle de Burn After Reading. Le trompeur devenu cocu. C’est exagéré, il faut l’avouer, comme comparaison. Mais c’est une façon comme une autre de faire comprendre combien l’Oscar décerné à George Clooney est davantage celui de la maturité ou du mérite, plutôt que celui d’une quelconque qualité. Un homme qui voyage et voyage et maintient dans son sac vide toute sa vie, ses sentiments ainsi que son passé. Projection vers l’avenir perpétuelle, fuite en avant même, mais surtout une vie rêvée qui arrange bien des choses. Jusqu’à bien entendu qu’il soit décidé par le scénario de noyer tout ce beau rêve dans une antithèse. Et la synthèse ?? Et bien malheureusement on l’attend toujours, comme souvent dans le cinéma « humain » américain.

 

Anna Kendrick et George Clooney. Paramount Pictures FranceIn the air a décidé de proposer l’envers de l’idylle beaucoup trop tard, sans travail de composition exigé de la part de Clooney. Cela aurait l’occasion de briller pour lui, dommage.  Clooney n’a jamais eu l’occasion réelle d’interpréter cette subtilité d’un passage à vide ou d’un ciment qui s’est définitivement durci sur ses pieds voltigeurs. Non, au contraire, on constate bien mais trop tard ce ciment, on a beaucoup trop vus ses pieds voltigeurs, et entre les deux ? Le néant dans tous les domaines : interprétation, scénario, seconds rôles, montage, musique.

 

George Clooney et Vera Farmiga. Paramount Pictures FranceD’où cette difficulté d’admettre la légitimité d’un tel oscar de meilleur interprète masculin de l’année ! Devrions-nous objectivement y voir plus modestement un honneur fait à un acteur qui a osé ironiser sur sa vraie vie personnelle ? Plutôt en effet. Bien des interprètes masculins auraient dû passer devant Clooney à l’heure du verdict final hollywoodien… Une vie sentimentale au ras des pâquerettes qui se retourne contre un bling-bling insaisissable fait d’avions, aéroports et clichés en « toc » ? Brillant scénario, et ce, dédoublé par une trame développant un certain métier difficile et mystérieux, de nettoyeur d’effectifs en entreprise.

 

Melanie Lynskey et George Clooney. Paramount Pictures FranceDeux trames prometteuses, dont la deuxième qui donne du chien à l’ensemble. Mais lorsque la scène finale de recrutement, voit cette jeune ex-nettoyeuse ne pas avoir besoin du moindre effort pour faire comprendre : « embauchez-moi, embauchez-moi », on comprend tout le problème de In the Air : l’ambitieux n’est jamais épousé par la concrétisation. Tout reste en marge, en surface, dans l’extériorité des choses. In the Air semble pauvre de son artistique au vu de l’ampleur des capacités et promesses scénaristiques. In the Air demeure dans un certain hollywood-centrisme, celui du clinquant qui claque lorsque le clap final intervient. Tel un soupir, tel un évanouissement, telle une parenthèse, In the Air sera oublié.

 

George Clooney et Vera Farmiga. Paramount Pictures FranceClooney parlera de ses yeux « saules pleureurs » par deux fois, sa petite collègue est une viscérale du travail jusqu’à ce qu’elle dévoile un cœur tendre mais trop tard, cette amante Vera Farmiga devient ainsi l’essence du film : un évanouissement, un rêve qui prend fin. Tout un symbole. Celui du vide. Qu’il est toujours difficile de faire s’incarner lorsque l’on s’appelle seulement Jason Reitman, qui s’est fié à ses producteurs, et c’est ce qu’il avait de mieux à faire, compte-tenu de son pedigree. On se souviendra désormais de la série de monsieur Reitman, baptisée The Office. Elle s’amusait à voiler le monde des RH d’un comique « mieux vaut en rire qu’en pleurer ». Ah ces anglo-saxons et le monde du travail, toute une froide réalité, tout un bonheur. Mais tant que ça marche ! Un jour il se pourrait bien que l’on se monnaye son bureau ou son ordinateur d’entreprise entre collègues. Cela créerait du lien social. Et cela serait facile à interpréter. What else, George ?



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La Traversée de Paris (Claude Autant-Lara -1956)

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« Jambier !! Jambier ! J'veux mes deux-mille francs ! Jambier !! » On accepte volontiers que dans cette séquence, Jean Gabin écrase Louis de Funès, tellement il le fait bien. D'ailleurs ce n'est pas le tout, Bourvil et Gabin restent un duo mémorable de complémentarité face caméra. Et ce, de bout en bout d'un Paris traversée sous l'occupation. Authentique.

Pitch     

Sous l'Occupation, Martin, brave homme au chômage, doit convoyer à l'autre bout de Paris quatre valises pleines de porc. Son acolyte habituel ayant été arrêté, il fait appel à un inconnu, Grandgil. Mais celui-ci se révèle vite incontrôlable et le trajet périlleux. Au terme de leur périple, Martin découvrira que Grandgil est un peintre connu qui s'est offert le luxe d'une petite aventure. Ils finiront par se faire arrêter et Martin paiera seul le prix de cette traversée.

 

 

Jean Gabin et Bourvil. Collection Christophe L.Du noir et blanc, du Jean Gabin à la présence impressionnante, un Bourvil fort en gueule pour lui tenir le morceau, La Traversée de Paris compte plus pour cette rencontre et son cadre fantasmagorique, que pour une sorte de réussite cinématographique au sens strict. La facture noir et blanc est belle, mais la mise en scène est tout ce que les critiques cinéma devenus réalisateurs de la Nouvelle Vague critiqueront : « d'un temps dépassé », selon François Truffaut lui-même. Claude Autant-Lara, tenancier d'un cinéma épuré, de mise en situation en cadre réel restreint voire en studio, relevait pourtant le défi de déambuler dans les rues de Paris, en cette année 1956. Mais 10 ans après, ces mêmes rues allaient être réajustées caméra à l'épaule par de jeunes réalisateurs, contre lesquels il rendra les armes dans les années 70. Si l'art est éternel, ses artistes ne font-ils que passer ? Encore oui.

Bourvil. Collection Christophe L.La Traversée de Paris reste ce que la Nouvelle Vague n'aura pas osé : arc-bouter un film sur une présence, une gueule. Et puis même deux, pendant qu'on y est. Car Bourvil-Gabin, c'est une force gigantesque ! Point d'évolution de personnages autres que celle découlant d'un combat de coq entre les deux. L'un paraît fort, l'autre est discret. Quand le second se dévoile, le premier fait tout pour masquer qu'il se rabiboche. Quand le second eut fini de montrer qu'il y avait une autre voie de conquête du Paris occupée, le premier (Bourvil) sera retrouvé comme bagagiste de train. Rencontre de deux rôles, deux forces artistiques complémentaires, qui défient le tout Paris à leur manière, bien que s'épousant l'un l'autre.



L'évolution de personnage ne tient plus à un jeu, mais à une sorte de réalité. Ces deux-là jouent le vrai ! Des forts en gueule qui se défient l'un l'autre et condamnent leur pérégrination à une victoire d'estime sur les occupants et leurs alliés. Victoire à la Pyrrhus même, quand on sait que tout était joué. Mais la rencontre est belle, on y croit. Les gens qui se mettent en travers de leur passage n'ont qu'à bien se tenir. Point besoin de fricoter avec les occupants pour bien vivre, ou de profiter de leurs égarements, non. Il faut simplement être plus malin qu'eux. L'un croyait le savoir, pendant que l'autre le savait sans le faire croire à personne. Authentique moments d'interprétations, que ces rues grises de Paris subliment de leur épanchement de brume et de créatures asservies.

Bourvil, Louis de Funès et Jean Gabin. Collection Christophe L.Paradoxalement, Louis de Funès connaîtra là, tout le contraire de ce qu'il tiendra plus tard, dans Le Tatoué, le grand rôle au sein d'un film avec le grand Gabin. Pourtant, comme Bourvil ici, il sera dominé. Bourvil avait en outre compris qu'il ne servait à rien de lutter à armes égales avec Gabin. Bourvil n'avait-il pas tiré de cette rencontre le Prix d'interprétation à la Mostra de Venise en 1956 ? Marcel Aymé avait été déçu de l'interprétation de Bourvil dans La Jument Verte, quitte à refuser Bourvil pour cette autre adaptation d'un de ses livres. Mais La Traversé de Paris, c'est Bourvil. M.Aymé le reconnaîtra après-coup.




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Inglourious Basterds (Quentin Tarantino-août09)

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« En détournant le sens de l’Histoire, je suis dans l’invention, dans la liberté créatrice, et je me libère ainsi du poids moral qui pèse sur les épaules de celui qui fait un film sur le sujet et qui se veut sérieux », TARANTINO

 

Plus d'infos sur ce film Affiche teaser américaine. Universal Pictures International France
Quentin Tarantino se moque terriblement...des nazis, et il le fait en français, pour beaucoup. Ce qui est jubilatoire au possible, c'est de constater l'état dans lequel Tarantino les met tous, les uns après les autres, les uns tout de suite cash, à coup de battes, les autres lentement à petit feu. Un peu ironique, un peu historique, beaucoup grotesque et burlesque, mais surtout sévérement burné que ce Inglourious Basterds, avec un rôle-pilote tenu par Brad Pitt, qui est à mi-chemin entre son rôle de gitan qui parle mal, qui bouffe les mots, dans Snatch, et son rôle de prof de fitness jusqu'auboutiste et risible dans Burn after reading. Sa mission : casser et scalper du nazi, comme c'est pas permis.


Brad Pitt. Universal Pictures International FranceIl était une fois...un Brad Pitt qui incarne un lieutenant qui n'aurait jamais eu sa place dans l'armée mais plutôt dans ce fameux genre d'escouades spéciales, formées de volontaires soit surentraînés, soit au passif d'hyperviolents. Le genre d'escouade que seuls les Nazis mettaient sur le terrain pendant la Seconde guerre mondiale, voire les Soviétiques, par exemple les Waffen SS ou alors les Kommandos d'élimination systématique. Donc Tarantino montre tout de suite le tableau sanguinaire et espiègle, dans lequel il va entraîner les spectateurs : ridiculiser les nazis en utilisant contre eux-mêmes, les forces qu'ils utilisaient pour asseoir leur domination en Europe. Notamment la violence physique, sans morale et sans lois. A ce titre, Brad Pitt et ses bourrins de camarades soldats sont à la fois sympathiques de moquerie, à la fois froids de violence. Ce lieutenant a un accent américain très affirmé, comment vous dire, très roulant et très hollywood chewing-gum, voilà (risible à souhait).

Christoph Waltz et Denis Menochet. Universal Pictures International FranceEn face d'eux finalement, se présente un certain « chasseur de Juifs », qui se révèle très bon acteur dans le parti pris de jouer tous les tics linguistiques allemands et toute la roublardise et la malice de conversation de ce genre de jusqu'auboutiste à la solde d'Hitler (campé par Christoph Waltz, Prix d'interprétation masculmine à Cannes 2009 !, excusez du peu !). Et puis une troisième partie se présente, celle des victimes potentielles : une fuyarde juive réfugiée à Paris du doux nom de Shosanna. Voilà pour le coeur de l'atmosphère de ce nouvel opus de Tarantino. Quentin Tarantino va progressivement mettre aux prises ces trois parties, pour en coudre à l'anguille d'or et au fil de soie, une véritable histoire triviale comme les westerns en avaient lancé l'idée, il y a déjà fort longtemps. Oui, sauf que dans le genre « film de guerre », ça décape et dépoussière.

Mélanie Laurent. Universal Pictures International FrancePartout où Tarantino passe, décidément rien ne résiste : son style particulier bonifie d'une façon remarquable les interpètes et leurs interprétations, ainsi Mélanie Laurent revêt un charisme affirmé, ainsi ce « chasseur de Juifs » paraît d'une redoutable saloperie morale tout en mettant systématiquement des gants blancs lorsqu'il essaie de parvenir là où il veut aboutir. Un vrai goujat, dont il nous prend l'envie de lui coller quelques baffes dès lors que l'on connaît son petit jeu et qu'on n'ignore plus jamais, ô combien jamais, là où il veut en venir. Malin et rusé, il fait parler qui que ce soit, et sous couvert de toutes les politesses se permet toutes les injustices morales vis-à-vis d'une actrice, d'un exploitant agricole, etc. Martin Wuttke. Universal Pictures International FranceIl incarne l'archétype même du régime nazi, tandis que des personnages comme Goebbels ou Hitler ne sont finalement que des caricatures, bien interprétées, maquillées et costumées certes, mais qui n'allient jamais dans la tête du spectateur, toutes les palettes d'un personnage. Ils sont une image, tandis que les autres personnages les dépassent de par leur profondeur et leur poids dans l'intrigue. En même temps, ce n'est pas comparable, ces deux-là ont existé historiquement, quant aux autres, ils représentent une petite histoire dans la Grande. Toute la réussite de Tarantino est d'associer dans une atmosphère à mi-chemin entre guerre et comédie, de l'esbrouffe et du vrai.

 

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Quentin Tarantino. Universal Pictures International FranceLes images "Hitler" et "Goebbels" seront véritablement déchirées à un moment du film, Tarantino se servant de cette fameuse séquence, pour justifier un film dans lequel il a osé inverser le sort. Cette séquence est d'ailleurs paroxysmique de violence : Tarantino s'offre l'occasion d'une fausseté remarquable, avec cette histoire d'attentat en plein cinéma parisien. Dans la forme, Tarantino pèse de tout son poids. La trivialité recherchée dans le scénario est admirablement servie par l'esthétique et par un cadrage volontairement de « confrontation ». Confrontation tantôt épique, héroïque, tantôt bestiale voire bourrine. De quoi jubiler dans son fauteuil, quand des fortes têtes telles que de faux officiers nazis, un chef de la gestapo, une actrice allemande agent double, s'acharnent à sauver l'insauvable : la séquence du bar cavé, est éblouissante de la part des acteurs et de Tarantino lui-même, qui orchestre tout cela avec une folie pure. Un chef d'oeuvre ! S'ensuivra notamment une séquence complètement à l'opposé : cette fameuse réception sur son 31 qui voit Brad Pitt incarner un Italien, avec « effectivement » un accent et une façon de parler...pas très italienne. Hilarant ! C'est aussi ça, Tarantino : passer d'un sentiment à un autre sans se prendre la tête. Quant à Brad Pitt, son personnage n'ayant jamais existé, ce sera à lui de conclure cette drôle de fausse histoire dans la Grande, avec tout le comique bourrin, qu'il aura démontré jusque-là. On se marre encore à l'heure de ces lignes...et en langue fançaise en plus, puisque pour un tiers, les scènes sont jouées directement en français. De quoi faire parvenir jusqu'à nous un grand respect : Quentin Tarantino réussit son film de bout en bout.


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No Country for old men (frères Cohen -2007)

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Transposition moderne du western, No Country for old men démontre une fois de plus combien les frères Cohen en ont sous la semelle. Choisissant délibérément d'associer leur pathos grotesque à la violence physique, ils s'offraient là quatre oscars mérités. Tout simplement parce que No Country for old men est un véritable univers autonome, un cadre "rêvé" pour du grand cinéma.


Pitch

Javier Bardem. Paramount Pictures FranceTexas. 1980. Au cours d'une chasse et en remontant la piste d'un gibier qu'il a blessé, un homme tombe fortuitement sur un cimetière de voitures, avec à leur bord des cadavres et un homme mourant. En aucun cas le résultat d'une partie de chasse qui aurait mal tourné, non. Sur un pick-up au conducteur agonisant, trônent des paquets d'héroïne par dizaines. Un peu plus loin c'est une valise bourrée de dollars qu'il trouve, empoigne et embarque avec lui. Oui, sauf que ce fric, quelqu'un veut le retrouver et embauche pour ce faire un véritable bourreau : un tueur à gages qui filera sans relâche l'heureux détenteur de la valise.


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Hypnotisme du grand vide désertique. Chapeaux et santiags. Malette et portes-flingues. L'univers dépeint par les frères Cohen est adapté du roman de Cormac McCarthy. Totalement incarné, ce grand vide de la frontière mexicano-américaine ne fait finalement pas revivre un monde de solitaires et de forçats du dollar, il n'est pas non plus tout-à-fait une transposition moderne du western. No Country for old men fascine d'entrée de jeu de par la trivialité simple de son élément perturbateur, qui frappe le spectateur d'entrée de jeu, pour entraîner à sa suite, une cascade de perturbations sans fin. On y entre spectaculairement, pour demeurer en haleine de bout en bout, grâce à un scénario des plus simple et en même temps des plus forts en gueule.

Paramount Pictures FranceQue Josh Brolin soit un acteur mineur utilisé pour sa gueule, que Javier Bardem soit obligé de composer un personnage sans aucune humanité, empêche certes le spectateur de s'identifier à l'un d'eux, mais le rapport à l'argent en sort d'autant plus accentué. Et finalement ça, tout le monde y trouve un attachement ou y place ne serait-ce qu'une dépendance matérielle. Alors entre un chasseur dont la spécialité n'est pas de protéger un magot, et un bougre dont le hobby consiste à réduire le sort d'une personne à pile ou face et dont la profession est de tuer sur parole, il est évident qu'on ne choisit pas le camp du bougre. Alors que pour être heureux, le spectateur devrait justement placer ses espoirs dans ce tueur antipathique... Parce que pour ce qui est du shériff, incarné par Tommy Lee Jones, cela flirte un peu avec la shériff impuissante (sauf dans son ultuime sursaut) de Fargo.

Paramount Pictures FranceToute la réussite des frères Cohen tient donc à un vrai savoir-faire en matière d'ironie : prendre le spectateur en étau entre un faible qui leur plaît, et ce fort qui déplaît. Ce dernier n'a aucune humanité en laquelle espérer. Et dans ce registre là, les maestro du grotesque, du ridicule qui ne tue pas, que sont les frères Cohen, n'en avait pas besoin de plus de violence physique et bestiale que cela pour associer de manière inexpurgeable l'image à l'intrigue. Javier Bardem a du d'ailleurs passer, de force, chez le coiffeur, de quoi avoir la gueule de l'emploi.

Paramount Pictures FranceDu bon cinéma, qui n'a pas besoin de trop montrer pour raconter, et qui n'a pas besoin de trop raconter pour justifier ses images. Finalement, il n'y a pas d'esthétique. Il n'y a pas de fond. Il y a un petit fond et une petite forme épurée qui se subliment l'un l'autre, pour donner une âme à un univers rendu autonome. Du vrai cinéma, sans filouseries. Du cinéma cash !

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Merci pour le chocolat ! (Claude Chabrol -2000)

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Une architecture scénaristique parfois risible ou sur-interprétée, sans aucuns éléments perturbateurs ni dénouement final convaincant, et bien ce n'est plus du cinéma, mais du théâtre filmé !

Pitch        
André Polonski (Jacques Dutronc), pianiste virtuose, et Mika Muller (Isabelle Huppert), PDG des chocolats Muller, se sont mariés à Lausanne. Auparavant, André a épousé Lisbeth dont il a eu un fils, Guillaume. Le jour de ses six ans, alors qu'ils étaient de passage en Suisse chez Mika, Lisbeth s'est tuée dans un accident de voiture. La jeune Jeanne Pollet (Anna Mouglalis), qui prépare le concours de piano de Budapest, apprend qu'elle aurait été échangée le jour de sa naissance avec Guillaume. L'infirmière aurait interverti les bracelets des deux bébés. À la recherche de ses origines et d'un mentor, l'ambitieuse débutante tente de s'approcher du maître. Cette intrusion va ébranler l'édifice familial.

Isabelle Huppert. MK2 DiffusionQu'une jeunette soit jalousée par une femme parce qu'elle occupe le plus gros du temps de son mari à lui donner des leçons de piano, ok. Si Jacques Dutronc compose avec légèreté, Isabelle Huppert reste trop ancrée dans son personnage, sans jamais en sortir, ne dégageant rien d'humain : de quoi priver le spectateur de la moindre identification et empathie ou sympathie. On en arrive à se demander pourquoi personne dans son entourage ne la remet pas à sa place... pour le bien du réalisme du scénario cela aurait été sympa.

Anna Mouglalis et Jacques Dutronc. MK2 DiffusionLe personnage de Huppert est le poumon du film autant que son poison lorsque l'on n'apprécie pas forcément l'art chabrolien de l'intrigue : successeur français de Hitchcock et Fritz Lang. Il s'agit d'une femme qui paraît froide de prime abord, avant  de dévoiler son petit jeu au spectateur seulement, étape par étape. Sauf que le spectateur, c'est une chose qu'il se sente le témoin ultime et que ça puisse le démanger de lui en coller une à cette femme, mais le spectateur ne fait jamais partie d'un film. Alors tout ce qui se charpente autour de ce rôle-titre de Huppert, ne me convient guère : finalement elle est telle que l'ensemble de son entourage devrait réagir un moment ou un autre, la remettre en place aussi sec, voire pire, l'assassiner avant qu'elle n'exécute sa "délicieuse" recette de la Mort.

Isabelle Huppert & Jacques Dutronc. MK2 DiffusionFinalement, le film peut séduire certains, comme dégoûter les autres grâces et à cause du même élément : ce rôle-titre. Je me classe parmi les "dégoûtés" car je me dis que logiquement personne ne devrait la fréquenter et qu'en même temps tout le monde aurait dû détecter son petit manège. Mais non : personne ne dit rien, et ce, jusqu'aux dernières vingt minutes de film.

Isabelle Huppert & Jacques Dutronc. MK2 DiffusionSon mari, campé par Jacques Dutronc, ne devrait même pas se poser la question de rester avec elle. Et pourtant Claude Chabrol bâtira toute sa trame sur elle, faisant demeurer Anna Mouglalis dans un rôle étouffé, et poussant Dutronc à composer l'antithèse de cette femme intransigeante : la gentillesse et la décontraction... mais jusqu'à rompre la corde. Quand on sait que la scène finale se bâtit sur l'absence des somnifères tant nécessaires à Monsieur, et que puisque Monsieur du haut de ses grandes berges n'a même pas le respect de devoir admettre s'en passer pour une fois, et qu'il oblige ainsi avec toupet cette jeune femme à prendre le volant à 22 heures passées...

Merci pour le chocolat, permet quand même, si on se prête au jeu chabrolien, de passer un bon moment de cinéma, ne serait-ce que par la nécessité de composer des acteurs Huppert et Dutronc. Mais la fin de cette histoire de chocolat laissera un peu sur sa faim. 

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Gran Torino (Clint Eastwood -fév09)

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Clint Eastwood. Warner Bros. FranceDoua Moua, Bee Vang et Elvis Thao. Warner Bros. FranceClint Eastwood et Bee Vang. Warner Bros. FranceClint Eastwood, Bee Vang et John Carroll Lynch. Warner Bros. France

Clint Eastwood, Bee Vang, Ahney Her et Brooke Chia Thao. Warner Bros. FranceBee Vang et Clint Eastwood. Warner Bros. FranceAhney Her. Warner Bros. FranceClint Eastwood. Warner Bros. France

C’est un plaisir timoré qui convient pour décrire le fait de revoir le grand Clint devant la caméra. Il a pris un coup de vieux, ce qui, au début du film fout un coup de nostalgie avéré : cela me fera assez mal que de voir un tel géant partir un jour. Le film commence peut-être par une séquence d’enterrement, mais il respirera la vie à plein nez jusqu’au bout…


 

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Warner Bros. FranceGran Torino est un titre un peu surfait, un peu celui qu’on donne, modestement lorsqu’on ne sait pas trop, à l’élément perturbateur du scénario. Ce gamin qui est pris la main dans le sac en train de lui voler son souvenir des années « Fordistes », a du coup la tête des mauvais jours. Pour le vieux grincheux de Walter (Clint Eastwood), qui souffre d’avoir eu en face de lui pendant toute la Guerre de Corée des « bridés » comme lui, comme il dira à maintes reprises, ce coup là est un coup de plus au moral, après la perte de sa femme. La gueule des mauvais jours, la bronca ronchonnante, ce vieux-là aux yeux vissés sur son chien fidèle et sa Gran Torino 1972 dernier modèle, n’a plus que le passé pour se faire avancer un pas devant l’autre.


 

Clint Eastwood. Warner Bros. FranceEntre son balai…pour nettoyer les salissures laissées par sa famille le jour de l’enterrement, son frigo à bières fraîches pour enfouir un peu plus son aigreur et le tuyau d’arrosage pour reluire le bolide auquel il prétend avoir posé le train directement sur la chaîne de montage, en cette belle année 1972, le vieux Walter est le dernier dans sa maison, et définitivement bien seul. Une décennie était passée entre l’achat de son bolide chez son patron, et sa corvée de 3 ans passés en Corée, qui l’ont tellement abîmé qu’il confond le peuple Mong originaire de Thaïlande, Laos et actuel Cambodge…avec ses ennemis d’avant.

 

Clint Eastwood, Bee Vang, Ahney Her et Brooke Chia Thao. Warner Bros. FranceLes insultes fusent autour de son gazon mitoyen avec celui de cette famille Mong, qui bien qu’ayant été pourchassée par les communistes d’Asie du Sud-Est, ne trouve toujours pas leur place en tant que voisins. Quelque chose qui dérange. Il faut dire que celui qui n’est plus à sa place, c’est plutôt lui : il est le dernier « blanc » d’un quartier de périphérie urbaine, où les maisons en bois mitoyennes sont le seul rapprochement entre les voisins, tous asiatiques. La grimace des mauvais comme des beaux jours, le grincheux ne supporte plus grand-chose, et rumine dans sa barbe jusqu’au jour où sans vouloir agir bien, il agira…dans le bien : aux yeux de ses voisins et à sa propre barbe à lui seul l’égoïste ronchonnant.

 

Clint Eastwood. Warner Bros. FranceLe rapprochement sera alors méticuleusement coordonné par Clint Eastwood à la caméra et face caméra, pour un double emploi qui décidément donnerait un coup de vieux à n’importe quel jeune réalisateur en vogue actuel. Clint. Malgré son âge, il rend une belle copie au plan technique, tout juste ce qu’il faut pour faire se tisser doucement des liens de fraternité entre son personnage et des voisins que tout séparait à première vue, hormis l’hospitalité et la bonté de ces voisins. Les guerres d’Indochine puis du Viêtnam, ils ne l’ont pas fait, ils sont trop jeunes, mais s’ils sont là aujourd’hui en Amérique, c’est parce que leurs ancêtres sont parvenus à fuir le joug communiste. Et cet ennemi là, le vieux Walter s’en rappelle aussi, visiblement davantage.

 

Clint Eastwood. Warner Bros. France

Sur un scénario du duo Nick Schenk et Dave Johannson, Gran Torino est un film au bonheur simple, mêlant la difficile acceptation de la différence de générations, à celle finalement moins rugueuse de la différence culturelle. La photographie est simple, le montage et les travellings ne sont certes pas à l’image de la Gran Torino, mais qu’importe ! Clint Eastwood fait plaisir à voir endosser pareil rôle.

Clint Eastwood et le directeur de la photographie Tom Stern. Warner Bros. France


Les deux jeunes acteurs Bee Vang (Tao) et Ahney Her (PHOTO / Sue) offrent une vraie répartie à l’expérience énorme de Clint. Ce trio permet au spectateur d’apprécier un vrai moment de cinéma : celui qui part d’un constat ordinaire pour proposer des envolées fraternelles et des bonheurs simples. Comme le cinéma US s’en est tant éloigné depuis deux décennies, hormis les moments de bravoure permis actuellement par les anciens acteurs reconvertis à la réalisation (Sean Penn entre autres) ou les anciens tourneurs de spots et vidéoclips comme Michel Gondry ou Paul Thomas Anderson.

Ahney Her. Warner Bros. France


Les instants de vie, les rencontres de parcours, au cinéma, qu’ils soient bons ou mauvais, restent une valeur sûre à ne jamais oublier. A 79 ans, Clint Eastwood a encore fait le métier, enchaînant cette réussite comme réalisateur-acteur sur la réussite même de L’Echange. C’est-à-dire vite et bien. Chapeau bas l’artiste !

Clint Eastwood et le directeur de la photographie Tom Stern. Warner Bros. France

 

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BURN AFTER READING (frères Coen -déc08)

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Affiche américaine. Working Title FilmsAffiche américaine. Working Title Films


Affiche américaine. Working Title FilmsAffiche américaine. Working Title FilmsAffiche américaine. Working Title Films

Sacrés larcins que ces Frères Coen ! Cette fois-ci en guise de farces et attrapes et de dindon de la farce on trouve la bonne vieille CIA ainsi que de parfaits nigauds prêts à tout pour obtenir une « récompense » auprès d'un certain Osbourne Cox, agent justement de la Central Intelligence Agency.


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Il a été dit et redit que les frères Joel et Ethan Coen avaient retrouvé leur superbe d'antan (Fargo 1993) lors de leur dernier long métrage en date : le noir No Country for old men. Et bien voilà qu'il pose une surenchère sur leur film phare, le bien nommé Fargo, avec cette fois-ci non plus la moquerie de la police mais tenez-vous bien de la CIA himself. Jouissif et corrosif à souhait donc que de voir cette agence connue se prendre plein de tomates dans la fig... au beau sortir de mandat de W. Bush. C'est à peu de chose près une belle parodie des films d'espionnage mettant en valeur le talent et le sérieux de ces agents au-dessus de tout soupçon.

Brad Pitt et Frances McDormand. StudioCanalVoilà que les frères Coen frappent et récidivent sur la moquerie du fond et de la forme de l'Homme. On prend de parfaits nigauds, risibles à souhait et on en fait de parfaits trublions innocents pour mettre en lien tout un tas de portraits burlesques de monsieur et madame tout le monde : l'agent de la CIA, le détective privé, la femme calculatrice, le séducteur invétéré qui reconnaît la texture d'un sol d'appartement tellement il en a vu des logements de ces dames. Brad Pitt tire son épingle du jeu en parfait naïf croyant avoir levé le lièvre d'un dossier « top secret » appartenant à OSBOURNE COX comme il dit si bien à plusieurs reprises tellement il s'y croit. Il est parfait d'idiotie: regard naïf et fuyant, en même temps il croit toutes les imbécilités qu'il prononce, et puis il est fortement porté sur son bidon de vélo et ses écouteurs de trainer de la société de remise en forme (mais pas de cerveaux) QUEDUMUSCLE.

John Malkovich a un fâcheux sJohn Malkovich. StudioCanalyndrome de Gilles de la Tourette, le fait d'être emmerdé par deux idiots le met hors de lui, à coups de « fuck » et « fucking » quelque chose, par exemple « fucking life », « fucking guy », etc. Très insolent et très jouissif dès lors que la rencontre a lieu entre ce Brad Pitt qui prétend que les « apparences sont trompeuses » et cet agent de la CIA qui croyant avoir tout perdu à travers les données que ce con lui propose de lui rendre moyennant rançon, va lui sortir de ces monologues !!

A VOUS DE JUGER SUR PIECE :







George Clooney et Tilda Swinton. StudioCanalOn a ce nigaud malgré lui qui ressortant toujours le même jeu de séduction, drague les dames sur internet, couche avec elle d'un soir à l'autre, et va se sentir dupé comme jamais à son tour.  Il faut saluer à ce titre la prestation de George Clooney qui joue son propre rôle, mais acceptant d'en faire une parfaite composition de ce que sa beauté masculine représente auprès de la gente féminine. Et puis quoi de mieux que la froide Tilda Swinton pour incarner la parfaite mante religieuse. Madame Cox à la ville, miss « Clooney » le soir venu, sous les draps.

George Clooney et Frances McDormand. StudioCanalCette adjointe de QUEDUMUSCLE et partenaire de choc de Brad Pitt n'a pas la langue dans sa poche quant à elle, elle conduit voracement, elle est jusqu'auboutiste dans son délire obsessionnelle de retrouver une seconde jeunesse toute liftée et dans la nécessité internationale de mettre à l'ombre l'espion qui se cache derrière les données recueillies par son imbécile de collègue. Il s'agit de la bien nommée Frances McDormand, actrice fétiche de messieurs les réalisateurs-scénaristes Coen. Ces deux nigauds de QUEDUMUSCLE forment une paire de premier choix pour mettre en relation doucement mais sûrement tout un tas de gens qu'on croyait pour certains super intelligent. Alors qu'en fait, eux aussi vont montrer une personnalité des plus risibles. La CIA bricoleuse et agissant en plombier permanent plutôt que de pouvoir vraiment régler les problèmes en amont, en prend plein le nez.

Les Frères Coen, décidément ont concocté un film jouissif, ou chaque personnage est plus ridicule que l'autre finalement, chose que l'on découvre à mesure que l'histoire avance. On rit donc de bon coeur en se moquant sans cesse de cette histoire aussi improbable et délétère pour l'Homme que celles pondues ci et là avec farce et force par ces deux frères volant au-dessus de la mêlée en matière de satire sociale et sociétale. Bravo à ces deux là, qui parviennent avec pas grand chose à faire un grand n'importe quoi qui se tient de bout en bout, et où les dindons et leurs farces se confondent mutuellement à mesure que leur habituel scénario structuré déroule son tapis rouge. Rideau s'il vous plaît ! A quand la prochaine boutade universelle et internationale sur l'espèce humaine ?



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Mon Führer (Dani Levy -mars08)

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L’acteur Ulrich Mühe est décédé le 22 juillet 2007. Mon Führer est son tout dernier rôle.

Pitch : 1944-1945 : Adolf Hitler va mal, très mal. Il est déprimé et profondément vexé par cette guerre contre les Alliés, qui est quasiment perdue. Le ministre de la propagande Joseph Goebbels tente alors désespérément de le remettre sur pied afin de lui faire tenir un grand discours à Berlin, "comme au bon vieux temps". Mais pour cela, Hitler a besoin d'un coach pour le motiver. Goebbels se souvient alors de Grünbaum, un professeur de théâtre juif. Ce dernier, emprisonné dans le camp de concentration de Sachsenhausen, se voit immédiatement libéré pour refaire d'Hitler un véritable dictateur. Au programme de sa remise "en forme" : des exercices de respiration ou quelques astuces psychologiques pour faire taire sa mauvaise conscience...

On est mal à l’aise, on sourit, on se fait re-briser le cou encore. Parfois insupportable que ce film, où l’humour dégoûte lorsqu’il est noir. Il est clair que si vous voulez une comédie joyeuse et efficace, passez votre chemin. Il reste peut-être deux catégories de joyeux satisfaits : les historiens et les cinéphiles.
Le réalisateur Dani Levy fait vraiment plaisir à voir lorsqu’il utilise certains stéréotypes propres aux nazis. Des poncifs rattachés aux nazis par les plus romanciers des biographes de Hitler : à savoir la frustration sexuelle voire l’homosexualité de certains dignitaires nazis, dont le Volkischer Beobachter, journal officiel de désinformation nazi, tenu par Goebbels, en faisait parfois la clé de voûte de ses chroniques politique –l’homosexualité était notamment utilisée par les services nazis pour mettre hors de la scène politique un dignitaire trop ambitieux, trop gourmand-. On surprend lors d’une scène, un jeune homme quitter nu le lit d’un officier nazi, pour s’enfuir par la fenêtre avant que la porte ne s’ouvre –une urgence en pleine nuit, une commande d’Hitler-.
Le fameux cas d’école que l’oralité hitlérienne, le vrai moyen de commandement utilisé par Hitler auprès de son cercle de dévoués –Goebbels, Himmler, Speer, etc-. Hitler est à table à 2 heures du matin, il engloutit de la purée. Lorsque son officier vînt le trouver pour lui dire qu’aucune voiture n’était disponible, Hitler se mit à gueuler. Une version ‘‘gueule de bois’’ de ‘‘La Chute’’, mais une vérité clairement démontrée par les plus grands historiens –Ian Kershaw, Bracher, Neumann, etc-. Hitler était un fou furieux quand une broutille venait mettre à bas ses plans les plus mégalomaniaques. La version humoristique, dans ‘‘Mon Fuhrer’’, est la suivante : il crache de la purée sur la table, en gueulant, de la purée projetée jusqu’à plus d’un mètre devant lui.

Il y a cet ordre de stopper l’envoi de l’artiste juif dans le camp de Sachsenhausen. Hitler gueule et gueule sur Goebbels. Et sur place, les voitures se croisent. L’officier chargé d’emmener l’artiste au camp fait face et tient tête aux quatre soldats mandatés par Hitler lui-même. Ils ne se comprennent pas et manquent de se tirer dessus pour un ordre qui vient de changer en cours de route –si je puis dire-. Une histoire de formulaire Q12 à fournir et remplir, pour valider le nouvel ordre, et ce fameux formulaire qu’ils n’ont pas sur eux. Et voici que Dani Lévy ironise sur la mécanique nazie, déréglée dès lors qu’on sort du cercle des dignitaires d’Hitler –Ian Kershaw le montre bien dans sa très reconnue biographie de Hitler, en deux volumes-.
Hitler est le noyau dur, tout l’humour tourne autour de lui. Il est très vite humilié, comme lors de cette scène où son préparateur physique lui demande de se mettre à quatre pattes pour faire le chien qui jappe. Son chien, Blondy, en profite pour lui monter dessus, par derrière. Le personnage d’Hitler est parfois ridiculisé, donc, et c’est assez atypique, donc sourire. Il ne peut plus honorer sa femme, Eva Braun, on s’en rend compte lors d’une nuit aussi courte que molle.
La grande réussite de Dani Lévy est d’avoir fait des Himmler, Speer, Hitler et Goebbels des personnages de série B, et de les monter les uns contre les autres, façon guignol –la tradition lyonnaise, pas l’émission-. Les intellos se montrent petit à petit naïfs –Goebbels-, Himmler est pathétique avec son déguisement et reste peu présent. Hitler se montre faussement humain mais aussi vraiment humain, parfois. Ce qui permet à son entraîneur juif de pouvoir rester près de lui, nourri, logé, blanchi, contre l’avis des Goebbels, Himmler, Speer. Le regretté Ulrich Mühe joue le rôle de cet artiste juif mondialement connu, qui aide Hitler à être prêt pour dans cinq jours -un discours devant les foules-. Hitler voit en lui une aide précieuse, pendant qu’il est la risée du QG berlinois des nazis. Cet artiste en profite alors pour retourner le régime dans son sens : il demande que sa famille soit délivrée du camp de Sachsenhausen, puis que tout Sachsenhausen soit évacué, avec une attitude ferme. Himmler est pathétique avec son bras bousillé, de retour du front. Plus besoin de lever le bras, pour faire le salut hitlérien, il est déjà attaché et fixé en l’air. Goebbels passe pour l’intello de service, qui prend Hitler pour un con. Speer fait des crises de jalousie parfois, en accourant dans le bureau d’Hitler. Ce professeur juif lui déplaît –Speer était le principal confident d’Hitler-.
Dans l’ensemble, c’est à voir dans une ambiance au préalable heureuse, sinon le cocktail burlesque-ironie-humour noir ne prend pas. On saute beaucoup trop du pathétique au grave, en passant par le satirique. C’est un mélange qui aurait été savoureux si le réalisateur avait canalisé ses envies. Même si le coup du Hitler invité par le couple juif, dormir au milieu d’eux sur le lit, est un bon miroir du genre du film : inclassable comédie, chronique burlesque parfois dramatique.


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